Little Rain Man

Boites à compter

Boites à compter

J’étais en plein boulot : assis à une petite table avec quatre mômes de trois ans, auxquels j’avais distribué des boîtes, des cartes à points et des pions. Les enfants devaient mettre dans chaque boîte autant de pions qu’il y avait de points sur la carte correspondante.

Pas si simple ! Mettre quatre pions quand on voit quatre points, c’est loin d’être acquis à trois ans…

La consigne donnée puis reformulée par les enfants, je les ai laissés plonger leurs mains dans le tas de pions afin de les répartir dans leurs boîtes en respectant les codes. Une fillette en a mis autant qu’elle pouvait en ramasser avec ses petites mains. Son voisin, plus réfléchi, prenait le soin de poser chaque pion sur un point avant de le déposer…

Mais c’est Thomas qui m’a le plus bluffé. Il a littéralement semé ses pions en passant au-dessus des cinq compartiments qu’il devait remplir, en égrénant des suites de nombres du style “deux, six, neuf…” En apparence, sans compter les pions qu’il ramassait et sans mettre en relation la constellation de la carte et la quantité déposée. Et il n’a pas fait une seule erreur.

Dustin Hoffmann dans Rain Man

Dustin Hoffmann dans Rain Man

Thomas est un enfant très introverti, il ne parle quasiment pas, et ne sait pas énoncer la suite numérique de un à cinq. Je lui ai donné une nouvelle carte (avec cinq autres compartiments) : même démarche, même résultat sans erreur. Ou alors, il la réalise lui-même en faisant “Oh oh !…” comme un certain Dustin Hoffmann dans Rain Man. A ce moment-là, j’ai vraiment repensé à la scène de comptage des allumettes cure-dents tombés au sol…

Raymond – 82, 82, 82…
Charlie – 82 quoi, Raymond ?
Raymond – Cure-dents.
Charlie – Il y en a beaucoup plus que 82…
Raymond – 246.
Charlie (à la serveuse) – Mademoiselle, combien de cure-dents contient la boîte ?
La serveuse – 250.
Charlie – Ah, pas loin…
Raymond – 246 !
La serveuse – Attendez ! Il en reste 4 au fond de la boîte…