Le Matobo, vous connaissez ? Mais si enfin, cet état africain dirigé par Edmund Zuwanie, où l’on parle le dialecte Ku ? Et dont l’unique interprète à l’Onu ressemble comme deux gouttes d’eau à Nicole Kidman ?…
Bon d’accord, j’ai vérifié, il n’y pas de Matobo sur le continent africain, probablement pas plus qu’il n’existe un dialecte et une ethnie Ku. Quand à Nicole Kidman, elle n’était une sublime traductrice à l’Onu que le temps du film L’interprète (The interpreter) de Sydney Pollack, sorti en 2005. Cela dit, cet excellent thriller politico-diplomatique ne manque pas d’intérêt.
Du Matobo où elle a vécu (dans le film, vous suivez ?), Nicole Kidman a ramené une intéressante légende à propos de la vie et de la mort, et à laquelle je pense qu’on peut légitimement accorder des origines africaines bien réelles. La culture orale africaine regorge de ces histoires où se mêlent croyances, sagesse, mysticisme…
Quiconque perd un proche veut se venger – même sur Dieu faute de mieux. Mais en Afrique, au Matobo, les Ku croient que la seule facon de guérir d’une peine est de sauver une vie.
Quand quelqu’un est assassiné, l’année du deuil s’achève par un rituel appelé “jugement de la noyade”.
Une fête a lieu toute la nuit.
A l’aube, l’assassin est emmené en bateau, et jeté a l’eau, ligoté, pour l’empêcher de nager.Les parents du mort peuvent alors choisir : le laisser couler, ou bien lui sauver la vie. Les Ku pensent que si les parents laissent l’assassin se noyer, ils seront vengés mais endeuillés à jamais.
Mais s’ils le sauvent – admettant ainsi que la vie est parfois injuste, ce geste balaiera leur chagrin.
On se venge pour ne pas affronter sa peine. (« Vengeance is a lazy form of grief »)
Texte de Nicole Kidman dans L’Interprète de Sydney Pollack (2005)